Des étudiant-e-s de master 1 en charge de classe sans aucune formation préalable !

Communiqué  Snep-Snesup du 23 mars :

Après avoir affirmé avec force qu’il avait « rétabli » la formation des enseignant-e-s en créant les masters Métiers de l’enseignement et de la formation (MEEF, bac + 5) et l’entrée progressive dans le métier des lauréat-e-s des concours, le ministère envisage de recruter et de mettre en responsabilité dans les classes des étudiant-e-s entrant en M1, sans aucune formation préalable au métier, dans cinq académies (Créteil, Versailles, Orléans, Amiens, Guyane).

Dès décembre 2014 le MENESR avait fait cette proposition pour l’académie de Créteil en réponse à la crise du recrutement. Il était prévu que les étudiant-e-s de master 1 soient « en alternance », c’est-à-dire employés à mi-temps comme contractuels. En cas d’échec (plus que probable) au CRPE en fin de M1, un concours leur serait  réservé dès l’année de M2.

C’est ce dispositif que le SNESUP, le SNES, le SNUIPP (FSU) avaient dénoncé et que le ministère tente aujourd’hui d’élargir.


Ainsi, au lieu de rechercher des solutions pérennes et efficaces pour les académies déficitaires, le gouvernement abandonnerait toute ambition pour la formation des enseignant-e-s et sacrifierait des cohortes d’étudiant-e-s et d’élèves, entérinant et renforçant de fait les inégalités territoriales.


Sous couvert « d’alternance », il utiliserait les étudiant-e-s comme moyens d’enseignement, alors que ce système, déjà imposé aux stagiaires en master 2 (en responsabilité de classe à mi-temps), a montré ses limites avec l’impossibilité d’une véritable formation universitaire et professionnelle de ce niveau-là. Utiliser les étudiant-e-s de M1 comme moyens d’enseignement diminuerait encore le temps de formation, lui-même déjà réduit de 40% depuis que le ministère affirme avoir rétabli la formation !


Pour ce gouvernement il semble bien, désormais, qu’enseigner n’est plus un métier qui s’apprend, ou alors pas pour tous ! Exercer en responsabilité sans avoir été formés, est-ce le prix à payer pour les étudiant-e-s les plus démuni-e-s ?

Cette alternance pervertie sert d’alibi pour faire face aux besoins criants de postes d’enseignant-e-s sans avoir à investir dans un cursus de formation de niveau master ambitieux. Le recrutement des enseignant-e-s serait de fait au niveau Licence. Quel progrès pour le service public d’éducation, à l’heure où l’OCDE elle-même recommande d’investir dans la formation des enseignant-e-s ?

Elle sert également d’alibi pour modifier en profondeur les modalités de recrutement des enseignant-e-s en faisant du contrat et de la précarité un passage obligé pour accéder au métier, comme les mesures Valls annoncées le 6 mars 2015 l’envisagent.


D’autres solutions existent. Les 11 000 candidat-e-s qui se sont inscrits au concours PE exceptionnel de Créteil attestent d’un vivier potentiel. Le SNESUP et le SNEP (FSU) réclament de longue date des pré-recrutements sur statut d’élève-professeur pour répondre aux besoins du service public : il s’agit d’abord d’inciter les jeunes à s’engager dans le métier et à se former, et non de les faire travailler, en responsabilité, sans formation professionnelle.

L’alternance est une modalité de formation exigeante, qui demande des moyens et la mobilisation d’équipes de formateurs pour élaborer des contenus les plus adaptés. Le SNESUP et le SNEP (FSU) dénoncent le mépris consistant à exiger, depuis deux ans, la conception en urgence de nouvelles maquettes, de nouveaux types de parcours, pour de nouveaux types d’étudiant-e-s, alors que ce travail nécessite plusieurs mois de conception. Ils renouvellent leur demande d’associer tous les acteurs de la formation pour qu’enfin, la formation des enseignant-e-s soit réellement rétablie. C’est une urgence, pour les élèves, les étudiant-e-s, les stagiaires et les équipes enseignantes.


Paris, le 23 mars

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